Soutenir les aidants des personnes atteintes de démence qui ont un emploi : le Programme du Centre Reitman pour les aidants qui travaillent

Sonia Meerai, et Drs. Joel Sadavoy et Mary Chiu.

« Nous étudions les facteurs clés qui ont des répercussions sur la vie concrète, psychologique et sociale des membres des familles canadiennes qui travaillent tout en prodiguant des soins à une personne âgée atteinte de démence à la maison. Notre objectif est de comprendre les défis associés à ce double rôle et de répondre à ces défis au moyen d’interventions validées qui fournissent les compétences spécifiques et les ressources affectives dont les membres des familles ont besoin pour concilier leurs préoccupations concurrentes. » Dr Joel Sadavoy

 

Pendant longtemps, le système de santé canadien a considéré les aidants naturels comme une source d’informations collatérales sur despatients. Cette perception et cette dynamique perdurent malgré le fait qu’il a été bien établi que les aidants sont une population à risque eux-mêmes de subir des répercussions connues et profondément négatives associées au fait d’être un aidant naturel qui travaille, c’est-à-dire quelqu’un qui est employé  et qui s’occupe d’une personne âgée ou d’un conjoint, ou qui est parent.

 

Il est urgent que nous changions la perception sociale à propos des aidants ainsi que la façon dont le système de santé les implique, compte tenu de l’augmentation rapide du nombre d’aidants qui travaillent et des répercussions que cette situation impose sur leur temps, leur énergie, leurs émotions et leur bien-être.

 

Les conséquences sociales et économiques pour le Canada exigent des réponses politiques ciblées pour compenser les milliards perdus en productivité.

 

Selon les docteurs Joel Sadavoy et Mary Chiu, qui dirigent une équipe travaillant sur ce sujet au sein du Consortium canadien en neurodégénérescence associée au vieillissement (CCNV), ces questions ne font que commencer à apparaître dans la littérature traitant de la démence. Il est essentiel de favoriser la discussion afin de mieux définir les problèmes, d’envisager des interventions efficaces et d’aider les employeurs canadiens et les décideurs à élaborer des règlements, des lois et des services à l’intention des aidants qui travaillent.

 

Pour encadrer ces discussions, les docteurs Sadavoy et Chiu proposent quatre domaines clés soutenus par des données probantes  nécessaires pour prodiguer des soins efficaces aux personnes vivant avec une démence :

 

  • La prise en charge des problèmes concrets liés à la maladie;
  • Les connaissances relatives à la maladie et à ses symptômes;
  • Les compétences spécifiques permettant de réagir adéquatement à des comportements liés à la démence, y compris une communication claire et efficace; et
  • Le maintien du bien-être affectif et psychologique de l’aidant.

 

Dans le but de favoriser l’acquisition de compétences, l’éducation et le bien-être affectif, l’équipe a fondé le programme Working CARERS du Centre Reitman. Ce programme vise à améliorer la capacité et l’aptitude de chaque aidant à fonctionner, notamment en favorisant les stratégies de résolution de problèmes et les compétences interpersonnelles en lien avec prestation de soins aux personnes atteintes de démence, et en favorisant la sensibilisation sur la façon de prendre en charge, sur le plan thérapeutique, les défis affectifs associés à la prestation de soins adaptés aux besoins de chaque participant.

 

L’équipe évalue présentement la pertinence du programme, qui connaît déjà un grand succès dans un centre urbain de l’Ontario, dans des communautés rurales du Manitoba et de la Nouvelle-Écosse. Plus précisément, l’équipe s’intéresse aux questions de recherche suivantes :

  1. Quels sont les problèmes, les défis et les expériences psychosociales auxquels sont confrontées les personnes qui travaillent et qui prodiguent des soins à des personnes de la famille atteintes de démence au Canada?
  2. Quelle est l’efficacité clinique, économique et sociale du programme Working CARERS du Centre Reitmanà l’intention des aidants qui travaillent ?
  3. Comment le programme Working CARERS peut-il être adapté aux aidants qui travaillent dans les communautés rurales (étant donné qu’ils font face à des défis uniques pour à du soutien et pour l’accès aux services)?

 

À cette fin, l’équipe a :

  • Mis sur pied un réseau canadien de partenariat de travail avec ses cochercheurs;
  • Organisé des groupes de discussion et a consulté les leaders de différentes communautés sur la façon de mettre en œuvre son programme dans des zones rurales;
  • Recruté des aidants qui travaillent comme participants et a commencé la mise sur pied duprogramme;
  • Diffusé un sondage national et recueilli des données sur les caractéristiques des aidants qui travaillent.

 

Être aidant d’une personne atteinte de démence dans les communautés rurales canadiennes

 

L’équipe a commencé à présenter et à publier les premiers résultats de ce projet (le premier de trois projets) axé sur le soutien offert aux aidants naturels dans les communautés rurales. Après avoir effectué des entrevues en profondeur et des groupes de discussion — pour mieux comprendre le vécu, les besoins et les attentes des aidants qui travaillent dans les zones rurales — l’équipe a adapté le contenu clinique du programme Working CARERS, ainsi que son mode d’administration. Le programme a ensuite été présenté sur une plateforme de vidéoconférence en direct sur le web.

 

Selon la docteure Chiu, les groupes de discussion, composés de participants, qui ont suivi l’interventionont permis de mieux comprendre les avantages et l’impact du programme adapté à plusieurs niveaux.

 

« En pratique, la vidéoconférence a permis d’améliorer l’accessibilité et de rejoindre un plus grand nombre de personnes. Sur le plan clinique, le développement des habiletés de communication a permis d’améliorer la perception des aidants vis-à-vis leur propre capacité à initier des discussions difficiles au travail et à la maison. D’un point de vue systémique, les intervenants et les aidants qui travaillent provenant de deux provinces différentes ont été informés des similitudes et des différences dans l’offre de ressources pour les aidants. Au cours de cette démarche, ils sont devenus plus impliqués dans les efforts fondamentaux visant à faire en sorte que leurs pairs soient mieux servis. »

 

Ces résultats orienteront l’équipe alors que le programme continue de se déployer dans d’autres communautés rurales de partout au Canada.

 

Selon la docteure Chiu : « Nous nous attendons à ce que cette recherche permette d’approfondir notre compréhension des stresseurs auxquels sont confrontés les aidants qui travaillent et s’occupent de personnes atteintes de démence, comparativement aux autres aidants, qu’elle permette de fournir des données probantes sur les interventions efficaces permettant de s’attaquer à ces facteurs de stress, ainsi que d’approfondir les connaissances sur les aidants des zones rurales et les obstacles et les facteurs favorisant la prestation d’interventions durables efficaces. »

 

Les prochaines étapes

En se servant de ce qu’elle a appris, l’équipe travaillera avec ses partenaires de la communauté et ses organismes partenaires pour développer le programme, encourager les changements d’attitude et de politique et accroître l’accessibilité à et l’utilisation d’interventions efficaces.

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