L’arrêt de la conduite automobile et la démence : le sexe a-t-il de l’importance?

Pour beaucoup de personnes âgées, avoir un permis de conduire et avoir accès à un véhicule sont associés à l’autonomie et la mobilité. Dans ce contexte, l’arrêt de la conduite automobile tend à être perçu comme la perte d’un privilège, perdre la capacité de se déplacer librement et dépendre des autres pour répondre à ses besoins de transport.

 

Bien qu’importants, les sentiments de perte doivent être soupesés par rapport aux questions de sécurité ayant une portée beaucoup plus large. Lorsque la qualité de la conduite automobile d’une personne se détériore, l’arrêt de la conduite automobile est nécessaire pour assurer la sécurité de la personne atteinte de démence et des autres personnes sur les routes.

 

Ceci a de plus en plus d’importance si l’on considère que le nombre de conducteurs atteints de démence augmentera au cours des prochaines décennies et que beaucoup de personnes atteintes de démence sont réticentes à remettre leurs clés de voiture.

 

Sachant cela, les collaborateurs de recherche au sein du Consortium canadien en neurodégénérescence associée au vieillissement (CCNV) ont examiné certains des facteurs qui sous-tendent la décision d’arrêter de conduire. La docteure Mary Tierney, qui dirige le Programme sur les femmes, le genre, le sexe et la démence (FGSD) du CCNV, a travaillé avec les docteurs Mark Rapoport et Gary Naglie, qui dirigent l’équipe sur la conduite automobile et la démence, dans le but de déterminer si le sexe faisait une différence dans la décision d’arrêter de conduire et, si oui, comment utiliser ces connaissances pour personnaliser le soutien dans la prise de décision.

 

Par l’entremise d’une méta-analyse portant sur 20 études longitudinales axées sur les différences reliées au sexe dans l’arrêt de la conduite automobile chez les personnes âgées atteintes ou non de démence, les chercheurs ont mentionné, dans une publication dirigée par la docteure Tierney et madame Nicolette Baines du programme FGSD, que l’arrêt de la conduite automobile était beaucoup plus répandu chez les femmes atteintes de démence que chez les hommes. Qui plus est, la même tendance se retrouvait chez les femmes et les hommes qui nétaient pas atteints de démence.

 

Les chercheurs ont proposé différentes raisons pour expliquer pourquoi la présence de démence ne jouait pas un rôle dans la prévalence plus élevée de femmes choisissant d’arrêter de conduire que d’hommes. Les femmes plus âgées dans cette cohorte avaient moins d’expérience de conduite, ce qui pouvait expliquer pourquoi elles éprouvaient plus de stress associé à la circulation routière et plus de tendances à l’évitement, étaient moins susceptibles d’adopter des comportements à risque au volant, conduisaient moins souvent et étaient plus susceptibles d’autocontrôler leur conduite automobile. En ce sens, au fur et à mesure que les femmes détiendront plus de permis de conduire et acquerront de l’expérience au volant, ces différences liées au sexe pourraient ne pas persister.

 

Cette méta-analyse du CCNV est la première du genre à étudier les différences dans l’arrêt de la conduite automobile chez les personnes atteintes ou non de démence. Bien qu’une précédente étude ait révélé que les femmes étaient plus susceptibles d’arrêter de conduire que les hommes (Morgan et col., 2009), le rôle de la démence n’avait pas été examiné.

 

Leur analyse souligne la nécessité d’intensifier la recherche sur les raisons expliquant les différences observées qui peuvent être dues à des différences biologiques entre les sexes, ainsi que des différences dans les rôles et les relations entre les hommes et les femmes. Des études longitudinales sont aussi nécessaires pour estimer l’incidence des différences entre les sexes dans l’arrêt de la conduite automobile des participants qui ont subi des évaluations diagnostiques en tenant compte de la présence ou non de démence. Ces études longitudinales devraient aussi comparer l’arrêt de la conduite automobile dans des régions comportant différentes densités de population et différents moyens de transport.

 

Surtout, leurs résultats démontrent que les différences de sexe et de genre peuvent avoir des conséquences importantes sur le soutien offert aux conducteurs atteints de démence avant et après l’arrêt de la conduite automobile.

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